La poésie est-elle morte ? – extraits de HÉRA DOIT ÊTRE FOLLE DE RAGE
Laissez-moi vous montrer que non. Enrichi d’illustrations magnifiques, ce recueil tiré de mes expériences les plus sombres et les plus extatiques vous arrachera des larmes de joie, de tristesse et de rage. Composés avec mes entrailles, trente poèmes vous rappelleront que la vie vaut la peine qu’elle nous donne.
En collaboration avec Jeanne, Laura, Jessica, Carina, Sam, Carla, Lia, Ariana et Mia, soixante photographies en noir & blanc illustrent ces poèmes avec éloquence. Qui a dit que la poésie était poussiéreuse ? La poésie est célébration de la vie dans ses manifestations les plus intenses. Elle est une ode à la vie spirituelle et matérielle. Elle nous rappelle que nous sommes mortels et que chaque seconde de notre passage sur Terre est aussi riche que l’univers entier.
La poésie est-elle morte ?
Laissez-moi vous montrer que non. Enrichi d’illustrations magnifiques, ce recueil tiré de mes expériences les plus sombres et les plus extatiques vous arrachera des larmes de joie, de tristesse et de rage. Composés avec mes entrailles, trente poèmes vous rappelleront que la vie vaut la peine qu’elle nous donne.
En collaboration avec Jeanne, Laura, Jessica, Carina, Sam, Carla, Lia, Ariana et Mia, soixante photographies en noir & blanc illustrent ces poèmes avec éloquence. Qui a dit que la poésie était poussiéreuse ? La poésie est célébration de la vie dans ses manifestations les plus intenses. Elle est une ode à la vie spirituelle et matérielle. Elle nous rappelle que nous sommes mortels et que chaque seconde de notre passage sur Terre est aussi riche que l’univers entier.
Polychrome
Je suis jaune comme le remords
Et vert comme le désir
L’un et l’autre me dévorent
Les vers se préparent à bondir
Je suis bleu comme l’infini
Et rouge comme la poussière
Tout l’univers se marre
Ridicule ? Certes oui
Je suis blanc comme un bébé
Et noir comme une pensée
L’espoir est un mégot
Le désespoir un escroc
Mes entrailles sont brunes
À l’intérieur ça triture
Mais le rêve au-dessus
Il est pur, oh ! comme il est pur
Le Baiser
Tu m’as dit que j’étais beau
Tu m’as dit que j’avais l’air perdu
Je t’ai demandé de m’embrasser
Tu n’étais pas sûr d’avoir bien entendu
Ta peau n’a pas la douceur d’une femme
Et pourtant tu m’enlaces mieux qu’elles
Ta tête s’incline et tes yeux se ferment
Le temps s’arrête autour de notre tandem
Tu m’as dit que j’étais beau
J’ai répondu que j’étais hétéro
Tu m’as dit que j’étais le seul ici
J’ai haussé les épaules et tu as souri
Ton dos frissonne comme une feuille
L’amour fraternel est amour pur
Deux corps qui se veulent
Dépassent leur nature
Tu m’as demandé si j’avais déjà essayé
Je t’ai répondu que non
Nous avons regardé Maman danser
Elle portait une robe marron
Ce soir, j’ai embrassé un garçon
Il venait du Nord et avait de l’aplomb
Je venais de l’Est avec une amie
Maman nous a salués et j’ai dit merci
Libido ou tendresse ?
Qu’est l’homme sans libido ?
Amuserait-il la tribune ?
Sculpterait-il ses abdos ?
Amasserait-il des fortunes ?
On n’étudie pas le droit français pour des prunes
Qu’est l’homme sans tendresse ?
Hurlerait-il à la lune ?
Irait-il à la messe ?
Naviguerait-il dans la lagune ?
On ne grimpe pas dans une gondole pour Neptune
Qui suis-je ? Libido ou tendresse
Je choisis l’une et l’autre me maudit
La schizophrénie me guette les amis
Et pourtant elles règnent sans partage
Sur nous qui sommes ses esclaves
Deux princesses pour un seul royaume
S’arrachent les cœurs sans pitié
Et moi au milieu sur mon trône
J’ai l’air d’un pion gris sur un échiquier
Dérailler
Dérailler du chemin
Tanguer un peu de côté
Sentir les mains du destin
Se laisser assez emporter
Sentir les mains du destin
Frôler nos frêles épaules
Guider nos yeux éteints
Voilà leur sacré rôle
Mais ces mains sont humaines
Nos rêves, nos peurs, nos désirs furieux
En nous s’égrène le vrai poème
Écrit par les peines de nos aïeux
Grand-père, grand-mère, que dites-vous ?
Et vous, arrière grand frère
Où dois-je aller, que dois-je faire ?
La clé réside au cœur de nous
La rosée de l’automne
Nue dans la nuit tu resplendis
Brune comme un éternel incendie
Ta peau tiède dans la pénombre
Attire mes pensées vagabondes
Sur le tissu de ta chair
Glisse une ombre lunaire
Éclairé par l’astre circulaire
On voit luire une nouvelle matière
Tes pieds légers comme l’air
Flottent par-dessus terre
Tes doigts torturent l’obscurité
Avec leur molle curiosité
L’odeur de ton entrejambe
Avec le lilas se mélange
L’eau de rose dont tu es parfumée
Est ton unique habit de soirée
Sous la robe de tes cheveux
Somnole un arôme capiteux
La sueur de l’été résonne
Avec la rosée de l’automne
Le moi est mort
Mon anneau d’or est arrivé hier
Où fuir ? Que faire ?
Menottes en flacon
Échantillon de prison
Je le vois tel un boa
Se resserrer autour de mon doigt
Je le vois faire pâlir les filles
Leur ôter pour de bon l’envie
De me parler et de m’aimer
Je me vois l’âme sombre
Finir ma vie dans son ombre
Je panique et pourtant
J’angoisse mais cependant
Son éclat subtil me fascine
Je n’ai pas assez de vocabulaire
Pour chanter son magnétisme
Il y a dans sa forme éthérée
Un peu d’éternité
On trouve dans l’éclat aurique
Quelque chose de biblique
Sûr qu’il me siéra à merveille
Qu’il me donnera l’air d’un roi
Et toi, d’une reine
Je désire et pourtant
Je voudrais mais cependant
Quel butor je ferais
Ce soir, demain… ?
Déserter aujourd’hui je ne pourrais
C’est Marlon Brando
Qui décline L’équipée sauvage
Le grand Bono
Qui dédaigne Pride
Victor Hugo
Qui délaisse Les misérables
Mon temps de mortel
Est arrivé à son terme
Demain j’irai jusqu’à l’autel
Sur les marches de pierre
Tu me passeras cet anneau d’or
À l’instant où je serai mort
Nous serons tous deux immortels
Moitié pris
Mes amis me voilà pris
Ma liberté avait donc un prix
Le temps d’aimer passe en une seconde
Sitôt remplacé par celui des comptes
Le fauve captif tourne en cage
La mort dans l’âme il regarde au dehors
Il regrette d’avoir convoité le bâton d’or
Le dompteur connaît le cœur du mâle
Combien d’êtres misérables
Sur mes pas ont-ils marché
Une vie de servitude à la clé ?
Combien de ces pauvres diables
Ont fini ensevelis sous les couches ?
La bague au doigt et l’amertume en bouche ?
Dis-moi, tendre fiancée
M’aimes-tu pour mon cœur d’artichaut
Ou pour mon costume bleu barbeau
Préfères-tu mon humour douteux
Ou mon nœud papillon rouge feu ?
Dis-moi, tendre fiancé
Aimes-tu celle que tu emmènes à l’autel
Ou sa robe de flanelle crème ?
Préfères-tu son rire qui dégringole en mille éclats
Ou son alliance dix-huit carats ?
Liberté, chérie
Où vont les vieux singes de l’animalerie
Quand on les relâche en pleine nature
Que font-ils de l’autre côté de la clôture
Goûtent-ils cette liberté qu’ils ont tant chérie ?
Ma famille file dans la troposphère
Mes amis ont repris leur carrière
Les cadavres de bière gisent à la déchetterie
Nos anneaux sont restés dans l’étui
Me revoilà célibataire
La liberté a un drôle de goût
C’est un litre de crème fraîche en août
Sur un kilo d’amandes amères
La tête dans l’oreiller je fixe le plafond
Mon cou nu me fait mal
Le poids du métal me donnait de l’aplomb
Le chêne déraciné tombe à la première rafale
Ma fiancée est redevenue maîtresse
Nous dormons ensemble néanmoins
Son vernis à ongles est le seul témoin
De nos noces annulées de justesse
Verrais-je un jour sa robe ?
Faut-il que ça aussi je lui dérobe ?
Avoir est un désir qui nous obsède
Être est la seule chose que l’on possède
Chaque enfant est une injure à notre duo
Chaque femme enceinte une ode à notre fiasco
Sur nous les anges de la discorde se penchent
Ils nous bercent d’illusions en stéréo
Tous les mariés sur nous se retournent indignés
Ils nous insultent et nous montrent du doigt
Les célibataires nous portent à bout de bras
Ils nous lancent de loin des baisers parfumés
Les mariages des uns font les divorces des autres
Nous n’avons choisi ni l’un ni l’autre
Héra doit être folle de rage
Je ne bonifie pas avec l’âge
À propos
Si la gestation de Héra a commencé il y a longtemps, l’idée de mêler ces poèmes avec des photographies est récente. En 2022, en effet, Laura Reinartz et Jeanne Lakits ont ravivé ma passion pour la photographie, que je réservais autrefois à l’étude de paysages.
On sait combien Baudelaire ne goûtait guère cette « industrie » obsédée par le vrai, reprochant à la photographie de se désintérésser de l’imaginaire en imposant un réalisme froid. Toutefois, Baudelaire aurait prôné une esthétique de la photographie tirée de la peinture, où le portrait « serait exact mais aurait le flou d’un dessin. »
Professeur de yoga, danseuse professionelle, Laura et Jeanne utilisent leur corps au quotidien. J’ai voulu rendre hommage à ce « médium vital », ce vaisseau de l’âme, qui a inspiré nombre de poètes depuis la nuit des temps. À l’image de Baudelaire toutefois, avec « le flou d’un dessin. » Ma rencontre avec Jessica fut un heureux hasard – les fruits de notre collaboration m’ont amplement confirmé la pertinence de mes choix artistiques : usage du noir et blanc, poses travaillées, traitement de l’image faisant ressortir une impression d’irréel et d’étrangeté. En 2023, Sam, Carina et Carla ont accepté de travailler avec moi sur une vingtaine de nouveaux visuels ; en 2024, Lia, Ariana et Mia ont rejoint l’aventure poétique.
« Héra doit etre folle de rage » sera disponible en deux formats, voir sur ma page Boutique.
Merci à Jeanne, Laura, Jessica, Carina, Sam, Carla, Lia, Ariana et Mia !